Près d'une fenêtre

Merlin avait l'air plus vieux et plus las que jamais ; accoudé au rebord d'une meurtrière, il regardait le fleuve s'écouler lentement dans les douves.
Soudainement, il se releva ; sa barbe rétrécit, et roussit soudainement. Son dos se redressa, et les rides s'effacèrent de son visage.
Mais malgré tout, ses yeux gris gardaient une étincelle de sagesse vieille comme le monde qui contredisait son apparente trentaine.
Il regarda autour de lui, aux aguets ; il était encore une fois trop longtemps resté exposé au souffle du dragon, et s'était plongé dans une profonde torpeur pour récupérer. Aussi grands que soient ses pouvoirs, il ne pouvait utiliser le charme suprême impunément.
Sa voix grave résonna tout d'un coup sur les murs de pierre de la salle :

- Andora ! Montre-toi, je sais que tu es là.

Il eut été en effet réellement surprenant que la petite fée ne soit pas présente. D'une manière générale, quand on voyait Merlin, Andora n'était pas loin.
Bien que parfois irrité des manières de la petite créature, Merlin était profondément attaché à elle. Et là, il avait besoin de sa présence.

- J'ai une mission à te confier. De la plus haute importance.

Il savait que le fait de se voir accorder la confiance de Merlin enchanterait la fée ; ou du moins l'espérait-il. Car personne d'autre qu'elle ne pourrait faire ce qu'il attendait d'Andora. Lui même en était incapable.

Depuis un moment déjà, Andora observait son idole en soupirant.
Ahhhhhh... Quand oserait elle lui avouer ses sentiments? Jamais! En fait, le mieux serait qu'il tombe amoureux de lui même, qu'il succombe devant son charme et sa beauté, son intelligence, sa... Petitesse?
Rhooooo.... Pourquoi fallait-il toujours que le sujet retombe sur le tapis?
Plongée dans ses profonde reflexion, la fée ne s'aperçut pas du changement de Merlin, et sursauta lorsqu'il prononça son nom.

Prêt d'un murs, un lumière brillante assortit de petites luciole apparut, et ANdora sortit de sa cachette, vêtue comme à son ordinaire, la mine boudeuse et les bras croisée. La lumière n'était pas obligatoire, mais l'effet était plus impressionnant.

Elle déploya ses fines aîles et voleta jusqu'au magicien, prenant un air gracieux et dégagé. ELle se posa pres de sa main, sur le rebord de la fenêtre, et lança, sur un ton involontairement boudeur:

- Je viens juste d'arriver...

Ca n'était pas crédible, mais elle avait sa dignité à sauvegarder. Elle sautilla, posa les main derrière son dos, battit langoureusement des cils, et s'inclina en une petite révérence qui la mettait en valeur:

- Que puis-je faire pour toi?

*Tout, tant qua ça ne m'éloigne pas. Pas envie qu'une de ces sorcières ensorceleuses s'approche dans mon dos...*

Merlin regarda sans étonnement la petite fée sortir de son trou de souris ; il la savait présente depuis longtemps, mais n'en dit rien, de peur de la vexer. Andora était une des personnes les plus chères au magicien, bien qu'il n'en laissat rien paraître.
Il se tourna vers elle et tendit sa main vers elle, comme pour l'inviter à y monter ; il s'expliqua :

- Tu vas aller dans la forêt, rencontrer une elfe qui vit seule, non loin du cercle de pierre. C'est une amie.

Il fronça les sourcils ; il avait dit amie... bien qu'il n'y aie aucune ambiguité dans ses relations avec ladite elfe, il savait qu'Andora prendrait bien mal ce terme, et se reprit.

- Enfin, elle est de notre coté. Elle recueille des informations pour nous, et j'aimerai que tu aille aux nouvelles.

Il pointa son doigt vers une direction de la forêt pour préciser :

- Vole tout droit dans cette direction. Si tu es perdue ou que tu as un problème, pense fort à mon nom, je pourrais entrer en contact avec toi. Enfin, je ne te fais pas les recommandations d'usages, tu as l'habitude...

Andora, rougit un peu, et sautilla jusque dans la main du magicien. Elle s'appuya contre son pouce, et écouta attentivement les paroles de Merlin, sentant la moutarde lui monter au nez.
Une amie hein? Elle allait voir ce qu'elle allait prendre, l'"amie"!
La rectification du magicien ne changea pas grand chose à l'état d'esprit de la petite fée, mais elle se contint, ne tenant pas à ce que son idole la prenne pour une idiote incapable de penser résonnablement.
Elle s'apprêta tout de même à faire une remarque acerbe pour lui demander qu'elle était la femme qui lui avait donné l'idée de cette mission afin de l'éloigner, puis elle se dit aussi que peut être elle était la seule digne de confiance pour les informations que détenait l'elfe...
Finalement, sa petite poitrine se gonfle de fiérté, et en gamine qu'elle était, elle secoua ses ailes et monta au niveau du visage de merlin. Elle lui plaqua un petit bisou de fée sur la joue, et se plaça les mains sur les hanches:

- D'accord! Je vais le faire, mais gare à toi si tu fais des bêtises en mon absence!

Elle agita un minuscule index en direction de l'homme immense, puis écouta ses instruction sur la direction à prendre. Un moment, elle croisa les bras, et adopta une expression vexée, lorsque il émit la possibilité qu'elle puiss se rater ou avoir des problèmes et ne pas s'en sortir, puis elle se demanda si elle arriverait à trouver un pretexte de le faire venir avec elle.
non... Si Merlin venait, il verrait "l'elfe"... Il succomberait à son charme à tout les coups! Il valait mieux qu'elle y aille elle!

- J'ai comprit! Tout droit par là... Je fais attention à Morgane et éventuel Gobelins, comme d'hab'! Et ne t'en fait pas, je n'aurais pas besoin de toi. Je suis petite, mais j'ai de la force!

Disant cela, la petite femme souffla sur la barbe de Merlin, qui seretrouva mêlée de cristaux de glace. Elle vola jusqu'au rebord de la fenêtre, et cligna de l'oeil en envoyant un baiser de la main, avant de sauter dans le vide en criant:

- J'essayerait de ne pas me faire gober par un oiseau!

A peine partie, déjà de retours, et la crainte commencait à augmenter. Et si il était arrivé quelque chose à Merlin pendant son absence?
Andora continua de traîner l'elfe derrière elle, battant des ailes comme une forcennée.

Il ne leur était rien arrivé tout le temps qu'elle avaient volé dans la forêt, et tant mieux, au moins elles n'avaient pas été retardée. Maintenant, la petite fée foncait vers la fenêtre toujours ouverte.

Derrière elle, pendue à son bras, elle sentait le poid de l'elfe qui augmentait.

*Oh non*

Sa magie avait tendance à s'en aller après un certain temps, et ce temps commencait à arriver à expiration.

* Ce n'est pas le moment que ça arrive!*

Andora donna un dernier coup de collier, et parvient à atteindre le rebord. Trente seconde plus tard, l'elfe roulait par terre dans un aterrissage raté, et reprenait sa taille normale en quelques instant, pendant qu'Andora, affalée par terre, reprenait son souffle.

L'elfe s'ébroua, déconcertée. Elle ouvrit les yeux, des yeux écarquillés qui étaient désormais les siens ; puis les frotta de ses deux poings serrés.
La pauvre fée qui gisait à ses pieds était en piteux état, et, en tant normal, Tanya l'aurait aidée ou se serait du moins inquiétée de son sort... Mais non. Elle se contenta de s'assoir sur le sol, dans une position plus confortable. Elle porta une mèche de ses longs cheveux bruns à sa bouche, et entreprit de la mâchouiller.
Elle resta un long moment dans cette position, le regard au loin, les cheveux dans la bouche. Puis, soudainement, elle recracha sa mèche et des larmes se mirent à couler. Elle ne fit rien pour les retenir, pleurant bruyamment à grands renforts de cris et de reniflements.
On put notamment entendre parmi ses cris : "Maman", "Papa", et d'autres noms plus incompréhensibles.

L'elfe ne prêtait aucune attention à Andora, et n'avait aucune idée de ce qu'elle faisait en ce moment. Puis soudain, au milieu de ses pleurs, elle cria :

- Au secours !

Puis, plus faiblement, elle appela d'une voix triste qui ressemblait à un murmure :

-Andora

Merlin fut tiré de ses pensées par l'arrivée de sa petite protégée et de l'elfe qui la suivait. Il haussa les sourcils, puis, après un regard interrogatif vers Andora, posa une main apaisante sur l'épaule de Tanya.

- Las, petite, las... vous ne risquez rien, et Andora est là.

Il passa une main noueuse dans sa courte barbe fournie de poils roux, et ajouta :

- Il me semble que Morgane a tenté d'intercépter nos communications. Plus d'espionnage pour vous, j'en ai bien peur : elle vous a repérée. Mais déjà, arrangeons la brume qui semble avoir envahi votre esprit.

Il passa la paume de sa main à quelques centimètres du visage de Tanya en lui ordonnant d'expirer lentement ; puis, se tournant vers Andora :

- Mon amie, je vais avoir besoin de ton aide. Nous allons nous lancer dans une action que j'eut préféré retarder, mais il semble que nous n'ayons plus le choix : le Roi a fait son temps sur le trône, il est temps de (tirer la chasse XD) choisir un autre dirigeant pour le royaume. Uther ne croit plus en les idéaux de Camelot, et Morgane puise de plus en plus de force dans la vieille magie qui gouverne la forêt : le temps est venu d'agir. Me suivras-tu, Andora ? Même contre le Roi lui même ?

La petite fée, le souffle court, s'était approché de l'elfe, et la regardait d'un air inquiet. Elle observait les moindres gestes de Merlin, et pour une fois, pas pour vérifier s'il faisait quelque chose de répréhensible envers une autre qu'elle, mais juste pour savoir si Tanya allait se porter mieux.
Elle écouta d'une oreille le discours du magicien.

*Espèce de plouc! Je n'ai jamais suivit le roi, c'est toujours à vous que ms pas se sont attachés! Si jamais vous me demandiez de me jeter dans les bras de Morgane je le ferais, et même pire encore!*

Mais elle garda ses pensées pour elle et se contenta de hocher la tête et de déclarer:

- Je vous ai toujours suivit, je ne changerais pas. Et à mon avis la reine a assez souffert comme cela.

Tanya écoutait la conversation distraitement, tout en tentant de retrouver ses esprits. Il suis semblait qu'il était question du roi... Mais que se passait-il donc ? Et pourquoi Andora et Merlin se retrouvaient-ils soudain la tête en bas, sans que cela ne parraisse les incommoder ?
L'elfe s'ébroua et les choses reprirent leur place habituelle. Elle sentit quelque chose s'agiter contre sa poitrine, sous sa tunique. Baissant les yeux, elle aperçut deux petites oreilles qui dépassaient de son col. Karos sortit sa tête et ses moustaches chatouillèrent le cou de la jeune elfe. Elle essayait de se rappeler comment Karos avait pu arriver là, elle qui ne l'avait pas senti ni vu, lorsqu'une voix retentit dans son esprit :

#Comment va mon elfe préférée ?#

Elle réfléchit à toute vitesse, se demandant comment elle, habituellement imperméable à la magie (elle ne savait pas comment l'utiliser, comment aurait-elle pu y être receptive ?), pouvait être en contact avec quelqu'un. Puis, elle se rappela les paroles de Merlin : "Il me semble que Morgane a tenté d'intercépter nos communications" et "elle vous a repérée" et Tanya paniqua. Si elle l'avait repérée, elle pouvait très bien aussi pénétrer son esprit...
Effrayée, elle regarda autour d'elle, et son regard tomba sur son chat... Il lui donna un coup de tête dans la clavicule, et la voix s'exclama, joyeuse :

#Trouvé !#

Soulagée, Tanya pouvait à présent se soucier d'autre chose, aussi se tourna-t-elle tout naturellement vers Merlin et Andora. Sa mémoire et sa conscience, désormais vives comme à l'ordinaire, travaillaient dur pour tenter de combler les trous, présents dans sa mémoire depuis sa rencontre avec Andora. Et c'est alors qu'elle se remémora - encore une fois - les mots qu'avait prononçé Merlin.

- Comment ça, plus d'espionnage pour moi ? s'exlama-t-elle.

Ce métier qui était sa vie, qui représentait sa vengeance, comment pourrait-elle l'abandonner ? Puis elle se rappela qu'elle venait d'intérrompre la conversation de ses deux compagnons aussi murmura-t-elle un "Désolé" discret. Puis, son esprit remonta plus loin dans ses souvenirs, et elle s'exclama, sans plus se soucier désormais d'être polie, par seul but de rassurer ses inquiétudes et de trouver des réponses à ses questions :

- Comment m'avez vous retrouvée, et avez vous su que c'était moi qui avait envoyée des rapports ? Comment se fait-il que Morgane m'aie repérée et que mon esprit se soit brouillé ? Et quel est ce complot contre le roi dont vous parlez ? Que se trame-t-il donc à Camelot ? Y suis-je en sécurité si Morgane me recherche ?

Enfin, hors d'haleine, elle reprit son souffle. Karos approuva son "coup de gueule" d'un simple ronronnement mental.

Merlin passa une main à peine ridée sur ses tempes. Andora le suivrait, c'était déjà cela de pris. Il lui sourit chaleuresement, mais ne la remercia pas explicitement ; il savait cependant que cela était inutile, elle comprendrait aisemment son soulagement à son regard.
Tanya, maintenant... elle avait bel et bien repris ses esprits, mais semblait encore déboussolée.
Il l'appaisa d'un signe de la main, puis déclara :

- Tu es en sécurité ici, cela ne fait aucun doute. Mais je préfererai en effet que tu ne retourne pas immédiatement dans la forêt - du moins, pas dans cette partie là.

Il retourna à sa fenêtre et se rassit, pour continuer plus à son aise :

- Quand à ma manière de te retrouver... sâche que la nature entière est en réalité gouvernée par un... un "dragon". Oh, pas un reptile qui crache des flammes, non, mais je ne peux t'enseigner ce que j'ai appris en tant d'années tout de suite. Ce dragon, ou cette entité, appelle là comme tu voudras, réponds à mes appels, et me dit tout ce que je veux savoir. Il n'était donc pas dur de te retrouver.
Il fit une pause, respira profondément, et reprit :

- Je ne veux cependant pas que tu restes inactive. Si tu le veux bien, j'aimerai que tu te joigne à mon action - à notre action, en fait, ajouta-t-il en souriant à Andora. Nous voulons renverser le Roi, et mettre à sa place quelqu'un de plus méritant - ou du moins, de plus fidèle aux idéaux premiers de Camelot. Es-tu des notres, petite elfe ?

L'elfe écouta attentivement les explications de Merlin. Elle ne comprit bien sur pas la totalité de cette histoire de dragon, mais tout ce qui importait pour elle était que le magicien lui avait assuré qu'elle était en sécurité. Il avait l'air serein, et Tanya puisa du courage dans son regard.
Elle se remit péniblement debout - Karos dut sauter prestement à terre - et déclara d'un ton enflammé :

- L'une des raisons qui m'a empêchée de venir à Camelot en personne était le fait qu'un tel roi y règne... J'ai bien pensé à aller voir la reine, mais...

Sa voix se cassa. En réalité, quand elle y repensait, tout cela n'était qu'une affaire de courage. Elle n'en avait pas eu assez pour se rendre à Camelot et se dresser officiellement contre Morgane.

*Je suis une couarde...* Cette pensée amère lui traversa l'esprit comme un poignard.

Elle épousseta sa tunique d'un air absent, à la fois pour chasser ses réflexions, mais aussi pour combler le silence qu'elle avait installé.

- Bref, reprit-elle... Je veux bien me rallier à votre action, ce roi ne sert pas son peuple et, bien que je n'en fasse pas vraiment partie (du peuple^^), je trouve votre cause juste. Je n'aime pas voir les habitants de Camelot malheureux, ainsi que tous les Bretons, bien sûr. Vous pouvez donc considérer que je suis des vôtres. Mais je voudrais d'abord avoir des informations supplémentaires... A qui voudriez vous proposer le trône, par exemple ?

Merlin, toujours assis à la fenêtre, se massa les tempes de sa main ridée. Il regarda l'elfe, plantée au milieu de la pièce, puis Andora auprès d'elle.

- D'ordinaire, je ne donnerai pas cette information. Mais c'est une course contre la montre, et j'ai besoin de ton soutien. J'ai bien réfléchi à cela, et je pense que la meilleure solution est de renverser le roi et proclamer la reine régente. Plus tard, peut-être, elle se remariera et alors, on pourra espérer un héritier du trône. Si ce n'est pas le cas, l'un des membres de la famille royale, le plus proche dans la liste de succession, prendra la suite.

Sa main retomba sur ses genoux ; il semblait plus vieux et fatigué que jamais.

- Je t'ai donné l'information que tu réclamais. A présent, réponds. Veux-tu te joindre à notre action, renverser le roi et placer la reine sur le trône ?

N'attendant pas la réponse de l'elfe, il se tourna vers Andora. Quelque chose venait de lui traverser l'esprit. Quelque chose qui n'avait aucun rapport avec cette conspiration, mais qui était tout de même de son devoir.

- Andora, ma chère. J'ai entendu dire que sa Majesté était de retour de son séjour en Germanie. Je suppose qu'après ce long voyage, elle aspire à se reposer ; mais je dois accomplir mon devoir de conseiller, et m'informer du résultat. Peux-tu, je t'en prie, aller solliciter à notre Reine un entretien ?

Merlin avait tant de choses à se préoccuper ! Des milliers de pensées traversaient son esprit, et il ne pouvait prêter attention à toutes. Il lui aurait fallu un instant de méditation, mais il avait bien trop à faire. A commencer par Tanya. Elle était une experte dans tout ce qu'elle entreprenait, et il avait besoin de son soutien dans cette conspiration. Il l'observa de ses yeux inquisteurs en attendant sa réponse, tentant de déceler toute la personnalité de cette étrange elfe.

[zavais zapé ce fofo.. dites merci à Will ^^]

La petite fée avait perdu depuis un moment toute conscience de ce qui se passait, elle n'écoutait même plus. Elle reflêchissait. Pourquoi donc lui avait il demandé une chose évidente? Bon, il n'y avait pas que ça aussi, mais elle se demandait comment une aussi grosse conspiration allait pouvoir être mise au point.
Elle retourna à la conversation lorsque Merlin s'adressa de nouveau à elle, et elle voleta un peu en agitant ses jolies ailes pour se reveiller. Sa longue absence lui avait sûrement fait louper plein de choses! Ca n'était pas très bien de ne pas écouter quand on parlait de choses aussi importantes...

Andora, ma chère... Elle savoura ce "ma chère". Elle était sûre que personne d'autre ne se faisait appeler comme ça! C'était réservé à elle, et puis voilà. Oui, elle aurait bien aimé pouvoir se grandir de facon permanente, et qu'au lieu de ma chère ce soit un ma chérie, mais on ne peut pas tout avoir, peut être un jour aurait elle assez de pouvoir pour se grandir pour toujours.

- La reine? Je vais y aller si c'est ce que vous désirez.

Elle inclina sa petite tête, et sortit par la porte normale, non sans se demander quelles bêtises allaient faire les deux autres pendant son absence. En plus elle allait encore se ridiculiser, personne n'allait la remarquer, et il faudrait qu'elle se grandisse malgré sa fatigue...
Mais bon on a rien sans rien, il fallait parfois faire des efforts!

Karos = le chat

Tanya ne répondis pas à la question de Merlin. Elle, pourtant si engagée une minute plus tôt semblait désormais se désintéresser de la question. Elle flanaît dans la pièce, le nez levé, regardant le plafond, comme si elle y voyait quelque chose de si fantastique qu'elle ne pouvait en décrocher le regard. Elle ne se retourna pas lorsque Andora ferma la porte. Son chat sur ses talons, elle se mit à déambuler dans la pièce, observant tout curieusement, comme si elle était une touriste dans une grande attraction. Elle s'approcha de la fenêtre où Merlin était assis, et tourna autour de lui, l'inspectant sous toutes les coutures, le reniflant, même. Karos (le chat) tira sur le bas de la robe du magicien, comme un chaton voulant jouer.
Par moment, Tanya se demandait :
*Mais qu'est-ce que je fais là ?*
Et, comme elle ne parvenait pas à trouver la réponse, Karos la rassurait :
#Qu'importe, puisqu'on s'amuse ! #

Pour l'esprit de l'elfe, cette visite de cette étrange salle durait des heures, alors qu'en réalité seules quelques minutes avaient passé depuis le départ d'Andora. Karos, soudain, se désinteressa de la robe de Merlin pour passer à la deuxième fenêtre de la salle. Il sauta sur le rebord et sentit avec extase le vent jouer dans ses moustaches et refroidir son museau. Tanya, elle, tournoya encore un moment autour du vieil homme, avant de rejoindre son chat. Celui-ci lui transmit toute la joie qu'il éprouvait, et l'elfe sentit une forme d'ivresse monter en elle. Des brumes de folie recouvraient encore son esprit, et sa liaison mentale avec le chat les emplifiaient sûrment. Tanya monta à son tour sur le parapet, et, haute de toute sa stature, écarta les bras. La bise s'engouffra dans sa tunique, gonflant ses manches et plaquant le tissu sur son ventre. Ses cheveux volèrent. L'excitation partagée du chat et de l'elfe semblait grimper vers les cieux. Ils voulaient la crier au monde, aux serviteurs qui s'agitaient, en bas, dans la cour. Ils voulaient que tout le monde sache à quel point il était bon de se tenir debout, les cheveux au vent. Ils auraient aimé que chacun puisse profiter de ces petits bonheurs de la vie, plutôt que de s'agiter comme dans une fourmilière.
Soudain, Tanya vit quelque chose. Du coin de l'oeil, elle avait aperçut une ombre qui se détachait sur le ciel bleu nuit. Un oiseau, un faucon sûrement, revenait à tire d'ailes vers le château. Il passa, rapide comme l'éclair, devant la fenêtre de la salle secrète, puis disparut hors du champ de vue de Tanya. Curieuse, elle se pencha pour revoir un instant ce port majestueux et ces plumes soyeuses.
Mais elle se penchait trop. Lorsqu'elle toucha le sol, un bruit sourd s'éleva jusqu'à Merlin et Karos. Sur les pavés de la cour gisait une elfe, le bras tordu dans un angle étrange. Sous sa tête, une tache rouge s'étendait de plus en plus. Mais, avant que quelqu'un n'ait pû s'approcher, elle était déjà de nouveau sur pied. Elle courut, malgré son crâne en sang, à l'autre bout de la cour, escalada prestement le mur d'enceinte (elle n'était pas elfe pour rien) et s'enfuit en direction de la forêt. Tout cela s'était passé trop vite pour que personne n'eut pû réagir. En cinq bonnes minutes, depuis le départ d'Andora, Tanya Kaladrya, espionne de son métier, avait disparu dans Brocéliande.
Karos, toujours perché sur le rebord de la fenêtre, observait la tâche touge sur le pavé de la cour. Avec ce qui ressemblait le plus à un air résigné, il se disait : "Au moins, dans la forêt, elle pourra profiter des plaisirs de la vie."
Mais une sombre pensée atténuait cet espoir : "Si elle ne meurt pas avant..."

Merlin n'avait pas eu le temps de réagir. En quelques minutes, Tanya avait disparu. Bouleversé, il s'était levé, et, debout près de la fenêtre, il fixait l'endroit où l'elfe avait atterit. Sa main se posa machinalement sur le pelage du chat auprès de lui, qu'il se mit à caresser. Fatigué, il se laissa tomber à genoux, et s'accouda au parapet. Au-dessous de lui, les valets s'agitaient, les commères discutaient. Las de ce bruit, il ferma la fenêtre d'un geste sec. Il voulait être au calme. Ne pouvaient ils comprendre cela, tous autant qu'ils étaient ? Le chat se leva, et, d'une démarche souple, s'approcha du magicien. Il se lova sur ses genoux en ronronnant, et lui envoya une pensée réconfortante.
Merlin, le regard tourné vers a forêt dans laquelle Tanya avait disparu, vit le jour se lever. Des pensées amères lui traversaient l'esprit. La veille, il avait envoyé Andora chercher cette espionne. Aujourd'hui, prise par la folie, elle s'était enfuie. Il espéra qu'elle pourrait se soigner et survivre avec les denrées des bois. Et surtout, qu'elle ne tombe pas sur Morgane, si vulnérable qu'elle était à la magie...
Le vieil homme se redressa et se frotta les yeux. Il se rendit compte que des larmes avaient sillonné ses joues sans qu'il s'en aperçoive. Bientôt, quand il serait prêt, il devrait aller voir la reine, remplir des formalités et des politesses, parler stratégie, vaquer à ses occupations. Mais il ne pouvait s'y résoudre, et chaque fois qu'il commençait à se diriger vers la porte, ses yeux repartaient par la fenêtre, son regard vagabondait. Aujourd'hui plus que tout, le poids de la vieillesse pesait sur ses épaules. Enfin, il s'arracha de ses souvenirs et de ses lamentations, s'essuya le visage et lissa sa robe de lin rèche. Il sortit, se dirigea vers les couloirs qu'il connaissait si bien et s'étonna de pouvoir accomplir des gestes aussi anodins.

*Près d'une fenêtre*

Près d'une fenêtre